Orginfo 113 – mars 2009

 

 

Faut-il produire à perte ?

Les escourgeons entament le redressement

Mettre la fumure azotée en orge de printemps dès la levée !

 

 

1.    Produire sous le seuil de rentabilité ?

Il ne faut pas être grand comptable pour comprendre que les récoltes des céréales vendues aux prix de cet automne - hiver l’ont été à perte et que le revenu de l’agriculteur n’est constitué exclusivement que d’aides européennes dont une partie importante sert l’aval qui s’approvisionne à moindre coût.

Avec des frais fixes et d’utilisation pour le matériel et la terre, très différents (et parfois comparativement très élevés) d’une exploitation à l’autre, estimés dans la comptabilité par les fermage et travail par entreprise, le total des frais s’élevait en 2004 à 1100 €/ha en escourgeon et à 1000 €/ha en orge de printemps.  Depuis lors, certains intrants ont doublé de valeur.  Avec des rendements nets attendus respectivement de 9 t et 7 t à l’hectare, les coûts de production sont ainsi estimés à 125 €/t en escourgeon et à 143 €/t en orge de printemps.

Sur base des cotations Creil en novembre (125 et 150 €/t rendu), et des frais intermédiaires après récolte dans les normes (réception, stockage, préparation, transport …) de 25 et 35 €/t, l’agriculteur aurait reçu 125 – 25 = 100 €/t en escourgeon et 150 – 35 = 115 €/t en orge de printemps.  Les pertes sont respectivement de 25 et 28 €/t.

Le revenu de l’agriculteur est donc bien uniquement constitué en 2008 de l’aide européenne dite DPU.  Il n’y a pas de DPU moyenne, chaque exploitation étant particulière, mais si on donne comme valeur à la DPU l’ ex-subvention allouée aux COP, exprimée en €/t,  on trouverait une DPU moyenne pour les régions limoneuse et condruzienne de l’ordre de 45 €/t en escourgeon et 58 €/t en orge de printemps.  L’industrie agro-alimentaire de l’aval récupère donc en orge 2008 de 2/3 à la moitié de l’aide européenne à l’agriculture.  Il reste au mieux à l’agriculteur un revenu de 20€ X9 = 180 €/ha en escourgeon et 30€ X7 = 210 €/ha en orge de printemps brassicole non déclassée.  Avant impôts et ONSS.

Pour avoir un revenu brut annuel ne fusse que d’un minimexé il faut déjà cultiver plus de 100 ha d’orge de brasserie.  Pendant que les grands brasseurs (Stella, Jupiler, Maes, ….) augmentent de nouveau la bière, soit disant que l’orge à augmenté.

Clair que s’ils ont le choix, les agriculteurs ont intérêt à cultiver des patates, des légumes et autres cultures sous contrat.  S’il reste de la place à combler en COP (céréales et oléo-protéagineux), l’orge de printemps peut toujours être semée jusqu’au 15 avril.

Peut-on miser, en récolte 2009, sur un redressement des cours en orge de printemps ?  Sans doute plus que pour les autres céréales dont les stocks sont dits importants.  Actuellement, les cotations donnent, en rendu automne 2009, 150 €/t en froment meunier et en orge de printemps pour la brasserie.  C’est pas fameux et impossible sans aide.  En Australie, Russie, Ukraine, Argentine (…) les producteurs envisageraient de moins semer. Autre facteur de redressement attendu : le déclassement de fait de Cervoise et donc une pénurie en orge hiver brassicole qui devrait accroître la demande en orge de printemps ;  il n’y a en effet aucun intérêt à livrer en malterie, avec des frais et travail supplémentaires, plus risques et ennuis divers, du Cervoise au prix de l’escourgeon fourrager (125 €/t) annoncé actuellement pour la prochaine récolte. 

Pour stabiliser ses approvisionnements, le secteur de la grande brasserie devrait proposer des prix corrects aux agriculteurs sur qui repose quand même toute la filière.  Mais peut être trouve-t-il son intérêt dans la volatilité des prix ?

2.    Les escourgeons sont au stade redressement.
Cultivez Cervoise en fourrager

Cervoise et Lomerit semés le 25 septembre sont les premiers à entamer le redressement depuis la semaine passée (15-20/3/09).  Il est temps de terminer le désherbage et d’appliquer la 2ème fumure azotée (urgente si on a fait l’impasse tallage). 

Au vu des prix annoncés pour Cervoise (voir plus haut), il faut conduire la culture en fourrager, mais rien ne change culturalement à ce stade.  Si d’ici un mois le marché redemande du Cervoise brassicole en améliorant le différentiel de prix, il sera encore temps d’ajuster la fumure de dernière feuille pour ne pas dépasser les normes de protéines.  

3.    apporter l’azote dès la levée en orge de printemps

Semis : l’orge de printemps peut se semer sans trop de problèmes jusqu’au 15 avril.  L’idéal n’est pas le plus tôt, mais le mieux quand le sol se prépare bien

Les semences disponibles sont essentiellement Chamonix et Sébastian.

La densité normale est de 250 gr/m2. 

Il est conseillé de rouler la parcelle si la ligne de semis n’est pas plombée par le semoir, ou si on a levé trop de « rugs ».  Rouler la parcelle est toujours bien.

Il est difficile de trancher entre un semis hâtif en terre froide, un peu plus précoce à la récolte, en comparaison d’un semis plus tardif en terre réchauffée. 

Il y a matière à discussion en ce qui concerne le désherbage, les pucerons, la durée de la levée (3 à 6 semaines pour atteindre le stade 1er talle entre un semis de mi-avril ou de mi-février) et les dégâts d’oiseaux pendant la levée, la résistance à la sécheresse … Le semis du 3 mars 09 commence à lever ce 23/3.

Plus important que la date de semis, pour le rendement, est certainement le climat en cours de remplissage des grains qui doit être idéalement ensoleillé sans être trop chaud et le sol étant suffisamment approvisionné en eau.  Plus important encore pour la qualité est le climat juste à la maturité : une période pluvieuse à ce moment peut tout gâcher.  Qui peut prédire aujourd’hui le climat en juin, juillet et août, par décade de surcroît  ?

Fumure : Les profils azotés étaient très faibles en sortie d’hiver et le climat a depuis lors été trop froid que pour changer la donne (-30 N par rapport à la normale).  L’orge de printemps disposant de peu de temps pour taller (20 à 30 jours), il faudra apporter la fumure azotée tôt : dès la levée en azote solide ; dès le 1er talle en azote liquide.

Dans les conditions de référence (apports organiques faibles à normaux de l’ordre de 30 T/5-6 ans et reliquats de 60 N sur 90 cm ; ou 80 N sur 1.5 m), on conseille d’apporter 60 N en début de végétation.  Une correction de 10 à 20 N est possible selon le profil.  L’orge de brasserie est déconseillée si le reliquat dépasse cette année 100N/90 cm.

Dans les conditions de référence, on devrait compléter au redressement avec une fumure de 30 à 40 N sauf si la végétation et/ou les maladies sont excessives. 

Il est déconseillé de complémenter si les apports organiques sont plus importants que la référence.

On vise ainsi une récolte entre 10.5 et 11 % de protéines.  Si vos récoltes passées dépassaient ces teneurs, il faut corriger votre fumure azotée en diminuant celle-ci de 25 N par 0.5 % de protéines excédentaires.