La Wallonie est couverte par environ 530.000 hectares de forêts, soit près de 30% de son territoire. Mais nul besoin de s’enfoncer dans ce poumon régional pour se rendre compte du danger qui menace. Rendez-vous dans un arboretum de l’université de Gembloux Agro-Bio Tech. Au pied d’un vénérable géant vert, un spécialiste observe, et son diagnostic est sans équivoque.
" Normalement, un hêtre sain à des grosses feuilles vertes et bien fournies. Celui-ci n’a pas des feuilles normales. Elles sont petites, jaunes, très claires. On distingue aussi des branches sans feuilles. C’est un signe de manque d’eau, constate Hugues Claessens, professeur de sylviculture et d’écologie forestière. Dans ce cas-ci, on voit aussi des champignons à la base du tronc, qui font pourrir les racines. Donc dans 2 ans, c’est sûr, il sera mort ".
Lorsque notre système immunitaire est atteint, nous sommes plus vulnérables. C’est la même chose pour les arbres : lorsque leurs défenses sont affaiblies, c’est la porte ouverte aux parasites en tous genres.
Actuellement, le début des problèmes, c’est le manque d’eau. Dans le cas de ce hêtre, c’est un champignon qui termine le travail. Mais les insectes se chargent parfois de cette basse besogne.
" Il y a quelques années, à la place de cette prairie, il y avait des épicéas, poursuit Hugues Claessens, un peu plus loin dans l’arboretum universitaire. Tout allait bien jusqu’aux canicules de 2018, 2019, 2020 et maintenant 2022, qui les ont aussi affaiblis. Ils ont été victimes d’un minuscule insecte ravageur, le scolyte. Quand l’arbre est en bonne santé, s’il perçoit une attaque, il remplit les trous de résine et les scolytes sont neutralisés. Mais dès qu’il est faible, en raison notamment de la sécheresse et de la chaleur, il n’est plus capable de se défendre. Ici, tous les épicéas ont disparu ".
Le vrai souci, ce n’est pas la sécheresse de cet été, c’est l’addition de ces épisodes extrêmes. Dit autrement : une canicule, ça va. Plusieurs, bonjour les dégâts !
" Il faudrait des périodes d’accalmie. Or, on est plutôt dans une tendance de sécheresses et de canicules à répétition. Les arbres accumulent les stress hydriques sans possibilité de se régénérer, déplore encore Hugues Claessens. On est clairement au début d’un basculement. Tout le monde ne l’accepte pas encore, mais les deux essences principales de nos forêts, les hêtres et l’épicéa, sont condamnées."