1       Orge de brasserie              (article paru dans le Livre Blanc de septembre 2015)

B. Monfort[1]

1.1        Résultats des variétés dans les essais EBC

Les essais EBC (réseau européen organisé par les malteurs et les brasseurs) recherchent parmi les nouvelles variétés d’orge de potentiel brassicole, celles qui, tout en maintenant une qualité au moins équivalente aux variétés témoins, pourraient satisfaire les agriculteurs par de meilleures performances agronomiques (résistances aux maladies, hauts rendements).

 

1.1.1          Les orges d’hiver brassicoles : Etincel confirme son fort potentiel

Cette année à Lonzée, comme en escourgeons fourragers, les rendements des orges d’hiver brassicoles sont exceptionnels.  La qualité est excellente malgré que les teneurs en protéines  soient un peu faibles.

Tableau 1 – Principaux résultats en orge d’hiver brassicole en 2015 et depuis 2012.  Rendements en pourcent du rendement moyen annuel des variétés (en kg/ha), paramètres de la qualité (teneur en protéines en %, calibrage en %, et poids de 1000 grains en gr). 

Source : essais ES15-01, ES14-02, ES13-02, ES12-02, Lonzée - Gembloux Agro-Bio Tech – CePiCOP

Données culturales :       en 2015 : fumure = 0-100-70 = 170 N, 2 fongicides (1/2 doses), 1 régulateur

 

Etincel et Casino sont les seules variétés à destination de la brasserie disponibles actuellement sur le marché en Belgique.

 

Etincel confirme ses excellents rendements des années précédentes.  Son potentiel est équivalent à celui de la variété Volume (hybride fourrager) mais s’exprime plus irrégulièrement selon les parcelles et/ou l’année.  Sa sensibilité à la verse et aux maladies est moyennement bonne.  Ses teneurs en protéines sont basses.  En France, Etincel est maintenant la variété la plus cultivée pour la brasserie-malterie et est la variété pour laquelle les superficies mises en œuvre pour la multiplication des semences sont les plus importantes. 

 

Casino apparaît moins performante en rendement que Etincel, de plus sa forte sensibilité à la verse constitue un défaut majeur pour une culture à destination de la brasserie.

 

1.1.2          Les orges de printemps brassicoles

Dans les essais de Lonzée, on a également enregistré une bonne récolte en orges de printemps malgré une très forte attaque de rouille naine en montaison, maladie mal maîtrisée par le fongicide de montaison pas assez spécifique et stade fortement allongé à cause des nuits froides qui ont sévi pendant cette période (23 jours au lieu d’une durée moyenne de 13 jours).  Le gros calibre des grains et les poids de 1000 grains corrects (48 gr en moyenne) sont l’indice que les orges de printemps n’ont pas souffert à Lonzée des périodes de températures élevées du début de l’été 2015.

Tableau 2 – Principaux résultats en orge de printemps.  Essais EBC à Lonzée – Gx ABT CéPiCOP. 

(1)     : rendements moyens des témoins en kg/ha = 100 % de l’année de l’essai ; protéines et calibre en % (moyenne des témoins)

 

Planet avec 97 qx/ha confirme son potentiel exceptionnel observé dans les pays voisins et semble promise à un bel avenir.  Cette nouvelle variété est déjà en développement en France.  Par contre Quench (81 qx/ha) (surtout cultivée au Danemark, en Allemagne et en Suède) s’est révélée très sensible à la rouille naine et décroche nettement en rendement en 2015.

 

Irina (91,5 qx/ha) confirme un beau potentiel et se développe rapidement en France, au Danemark et en Grande Bretagne.  Elle est sensible à la rhynchosporiose comme Explorer (89 qx/ha).  Odyssey (93 qx/ha) retrouve son beau potentiel de la récolte 2013 à l’inverse de Concerto (87 qx/ha).  Ces deux variétés « non – GN » (sans Glucosidic Nitrile) sont surtout cultivées en Ecosse et en Grande Bretagne à destination de la distillerie (whisky).

 

Sunshine (88 qx/ha) confirme son potentiel trop moyen et irrégulier.  Cette variété à teneur souvent élevée en protéines est plus cultivée en Europe Centrale (Pologne, Tchéquie).

Les nouvelles variétés Crescendo, Ovation, Dorinka, Sangria (93-94 qx/ha) et surtout Planet (97 qx/ha) confirment que la sélection génétique progresse toujours efficacement en orges de printemps !  Les anciennes variétés Barke et Scarlet (77 qx/ha), abandonnées chez nous depuis quelques années mais encore cultivées fortement en Argentine et dans les pays de l’Est confirment ce progrès.

 

La liste des variétés recommandées en accord avec les brasseurs, les malteurs et les négociants-stockeurs sera diffusée en février 2016 avant le semis des orges de printemps à l’occasion du prochain Livre Blanc.  Dès à présent, les agriculteurs prévoyant de cultiver l’orge de printemps en 2016 doivent tenir compte des conseils suivants.

1.2        Conseils de culture en orge de printemps

Choix des parcelles pour de l’orge de printemps : d’une manière générale, il faut éviter les parcelles riches en humus actif (jachères ou prairies avec légumineuses retournées récemment, fortes restitutions organiques).  Les bonnes terres « à betteraves » faciles d’accès en sortie d’hiver doivent être choisies en priorité.  D’autre part les parcelles trop filtrantes (séchantes et donc avec des risques plus élevés d’échaudage) ou présentant des défauts de structure (!!) ne conviennent pas  parce que les orges y sont plus sensibles que les froments.  La place idéale de l’orge de printemps est en 2ème paille, après un froment, où la maîtrise de la fumure azotée est plus facile.  Si possible, réalisez un profil azoté de la parcelle tôt en sortie d’hiver.  Après betterave, comme en froment, envisagez un traitement des semences contre la mouche grise et suivre les avertissements donnés pour la protection des semences en froment.

 

Date de semis en orge de printemps : il est conseillé de semer entre le 20 février et le 15 mars dans un sol suffisamment ressuyé, « quand il fait bon labourer ».  Ne semer que si on est assuré d’avoir suffisamment de soleil que pour blanchir le lit de semences.  Les semis précoces sont souvent plus favorables à l’enracinement et la résistance à la sécheresse lorsque le semis est réussi.  Le principal avantage des semis de février est d’atteindre le stade 1er nœud avant les premiers vols de pucerons vecteurs de jaunisse nanisante au printemps.  Un semis hâtif lève lentement et risque plus d'être ravagé par les pigeons et corvidés.  En outre dans ces semis, les vulpins peuvent être plus envahissants.  Il n’y a donc aucune raison de se presser avant le 15 mars si les conditions de semis ne sont pas très bonnes.  Par contre, plus le semis est tardif et plus la préparation du sol devra être affinée pour une levée rapide. 

Dans toutes les situations, mais surtout si la préparation du sol ou la levée ne semblent pas satisfaisantes, il ne faut pas hésiter à rouler le semis (le plus tôt est le mieux, mais le roulage peut être fait sans aucun problème jusqu’au stade 1er nœud) cela permet un meilleur contact entre les semences et les particules de sol et également de conserver l’humidité du sol.

En mai, on ne mettra de l’orge de printemps que s’il n’y a pas d’autre choix.

 

Densités de semis : semer sans jamais dépasser 250 grains au m2.  Les essais à Lonzée montrent qu’on peut descendre sans problème à 175 g/m2 lorsque les conditions de semis sont correctes.  Des dégâts de pigeons ou de corvidés ne sont pas moindres avec de fortes densités de semis ; par contre les oiseaux font plus difficilement des dégâts quand la parcelle est roulée.


[1] Projet APE 2242 (FOREM) et projet CePiCOP (DGARNE, du Service Public de Wallonie)